Droit moral de l'architecte et démolition de l'immeuble

Image
18/01/2017
Affaires - Droit économique
Civil - Immobilier

Si la vocation utilitaire d'un bâtiment conçu par un architecte interdit à celui-ci de prétendre imposer une intangibilité absolue de son oeuvre, à laquelle son propriétaire ou acquéreur est en droit d'apporter des modifications lorsque se révèle la nécessité de l'adapter à des besoins nouveaux, il importe néanmoins, pour préserver l'équilibre entre les prérogatives de l'auteur et celles du propriétaire ou du futur acquéreur, que ces modifications n'excèdent pas ce qui est strictement nécessaire et ne soient pas disproportionnées au but poursuivi. Ainsi, la démolition doit intervenir dans un délai suffisant pour que le public ait eu le temps de découvrir l'oeuvre et la décision de démolir doit être justifiée par un intérêt légitime et ne pas s'apparenter à un abus du droit de propriété. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris le 2 décembre 2016.

En l'espèce, l'immeuble litigieux a été édifié en 1971, de sorte que la démolition envisagée intervient dans un délai suffisant après sa construction pour que le public ait pu accéder à l'oeuvre. En outre, la destruction est nécessaire à la réalisation d'un projet qui prévoit la création de 172 logements d'habitation et de locaux commerciaux, l'offre de logement ne permettant plus de répondre aux attentes et besoins des habitants, tant en termes de diversification du parcours résidentiel que de qualité du cadre de vie, les dysfonctionnements urbains propres au quartier dans lequel l'immeuble est édifié participant au sentiment de dépréciation, voire d'insécurité que peuvent ressentir les habitants à l'égard de leur environnement quotidien. Dès lors, la décision de procéder à la démolition de cet immeuble, conséquence notamment du permis de construire et de démolir accordé par la mairie et transmis à la préfecture, que l'architecte n'a pas au demeurant contesté, répond à un motif légitime d'intérêt général, proportionné au regard du droit moral de l'architecte et ne procède pas d'un abus de droit du propriétaire ou du futur acquéreur, ni même d'un comportement fautif.

Par Vincent Téchené
Source : Actualités du droit